Lettre à vous tous. 

L’œuvre entière de Jules Mougin est toute dédiée à ses parents ouvriers.
Jules naît à Marchiennes, en 1912, un dix mars. Il obtiendra le certificat d’étude pour entrer aux PTT, mais avant de pratiquer son métier de facteur, il faudra gagner contre la tuberculose qui, déjà, lui a enlevé son père en 22. Très tôt il écrit ce qu’il y a de plus vivant, de plus rebelle, le cœur gouverne. Au tout début de sa parole, il y a les usines, le monde ouvrier. Puis l’écriture va devenir, au fil des jours, cette fontaine éternelle, curieuse de lumière, présence à l'autre.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

Est-il le moins du monde possible de s’aimer, répondez-moi ! En utilisant la Poste comme, en quelque sorte, le premier éditeur de France, Jules Mougin peut dire avec la Lettre son chant d’amour, et parfois sa haine, oui les jours mal lunés comme les jours fastes, donner ce goût de vivre aux hommes, mais aussi, son dégoût de la guerre ! Ses compagnons épistolaires, Chaissac, Dubuffet, L’Anselme, Clavel, Calaferte, Bazin, Ernestine Chassebœuf … et tous ceux qui voudront bien l’accepter comme il est, comme il aime, à visage découvert. Se marie avec Jeanne en 36. Leur maison est baptisée «Baumugnes» pour marquer leur rencontre avec Giono.

 

Publié par de beaux éditeurs comme Robert Morel, Seghers, Vodaine et aujourd’hui Philippe Marchal, il sera surtout connu pour avoir été facteur rural à Revest-des-Brousses durant près de 20 ans. Sa carrière s’achèvera à Ecouflant, près d’Angers. Sa tournée connaît des haltes, mais aussi des hâtes : il faut dire et redire son amitié avec un nuage rond, tout autant que l’urgence de crier contre ce monde fabriqué par la peur et l’injustice. Jules Mougin ou la révolte du cœur ! Ainsi son œuvre aura déroulé durant près de soixante dix années, sa longue fugue pour encre de Chine et plume Sergent-major, en résulte un incroyable vivier de missives, de dessins, d’objets réalisés par la seule passion de faire des choses, comme ça, pour le plaisir ! Tout dire, surtout ce que l’on veut taire, sa poésie rompt les rangs de la monotonie, de la prétention intellectuelle, il n’écrira jamais que par nécessité, poussée vitale. Ecrire, pour Jules, c’est vivre ! Chacune de ses lettres invite à dire à voix haute, comme pour bonifier l’air, avec l’inscription d’un « Merci, facteur » sur l’enveloppe, c’est le salut fraternel. Souvent aussi Jules oblitère la lettre d’un « Visage qui danse », le dessin oui, c’est son salut à la vie.

Claude Billon, facteur, ami de Jules.

 

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